Emile Bernard (1868-1941)

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Cela faisait belle lurette que je n’avais pas profité de la gratuité des musées le premier dimanche du mois ! Mais le week-end dernier, l’envie m’a prise d’aller découvrir au Musée de l’Orangerie l’œuvre d’Emile Bernard (1868-1941), que je connaissais vaguement de nom. L’exposition, qui se tient jusqu’au 5 janvier 2015, explore toute la carrière de ce peintre, graveur, romancier, poète et critique d’art, qui n’a eu de cesse de rechercher un absolu artistique. Si je n’ai pas pu prendre de photos – interdites – (et j’ai été sage, je n’ai volé que cette seule image ci-dessous !), j’ai cette fois récolté quelques citations qui dépeignent bien le personnage. Car quand dans l’histoire de l’art, on a souvent vu les artistes d’avant-garde partir du classicisme pour aller vers la modernité, pour Emile Bernard, ça a été complètement l’inverse !

A la fin des années 1880, Emile Bernard inaugure avec Louis Anquetin le style cloisonniste qui prône des compositions divisées en aplats de couleurs franches cernées d’un trait noir, qui rappellent l’art du vitrail et s’inspirent des estampes japonaises. Van Gogh, Gauguin et le groupe des Nabis s’empareront de ce style. De 1886 à 1891, Emile Bernard rejoint d’ailleurs Gauguin à Pont-Aven, avant de se détacher de lui suite à un différend sur l’évolution du symbolisme. Fréquentant en autre Odilon Redon, Emile Bernard devient une personnalité du mouvement symboliste : en recherchant une pureté esthétique des lignes, des formes et des couleurs, en se souciant moins de son sujet et en faisant appel à son imagination, sa peinture devient alors plus spirituelle.

Finalement, le tableau devait se résumer dans une architecture définitive en liant toutes les parties, d’où la nécessité de cerner les formes d’un trait et d’augmenter l’intensité chromatique ; ces deux moyens devenant le langage même de l’ouvrage. Emile Bernard, 1936

L’étude des crépons japonais nous mène vers la simplicité. Nous créons le cloisonnisme (1886). Anquetin va plus loin. Il a remarqué, à travers les vitres colorées d’une porte, que le jaune donne une impression de soleil ; le vert, d’aurore ; le bleu, de nuit ; le rouge, de crépuscule. Emile Bernard, 1903


En 1893, il part à la rencontre des grands maîtres anciens en Italie, en Grèce, en Turquie et en Egypte où il s’installe jusqu’en 1904. L’Orient devient sa principale source d’inspiration. Renouant avec la tradition en peignant des figures réalistes sur des formats monumentaux, il remet en cause les avant-gardistes.

J’avais posé mon critère sur cette phrase, souvent formulée à mes amis : voir le style et non pas l’objet. Emile Bernard

De retour en France en 1904, Emile Bernard passe par Aix-en-Provence où il rencontre pour la première fois Paul Cézanne. Il restera un mois à ses côtés. Ses œuvres de l’époque s’inspirent largement du style de Cézanne, tant dans la palette chromatique, la disposition des objets, la géométrie et les perspectives.

C’est en 1905 seulement, après avoir pendant plus de quinze ans admiré ses œuvres jusqu’à en faire mon guide dans les premiers essais, que je connus mon premier maître d’élection : Paul Cézanne. Emile Bernard, 1904

Tout au long de sa carrière, il étudie les artistes de la Renaissance et découvre aussi les grands maîtres espagnols, tel Vélasquez . Il analyse leurs œuvres pour enrichir ses recherches artistiques.

S’efforcer vers l’originalité est une bonne tendance, meilleure que celle qui consiste à l’étouffer ; mais il faut que cette originalité ne soit pas creuse, ait la tradition, les maîtres, la nature pour appui. Emile Bernard, 1895

Emile Bernard produira aussi des œuvres graphiques : dessins, aquarelles, gouaches, pastels, zincographies, etc. Autant de techniques qu’il exécute avec talent où il emploiera tantôt un langage synthétique, tantôt un langage symboliste. Il illustrera aussi des œuvres littéraires d’auteurs renommés.

Dans les années 1920, il abandonne définitivement le concept de modernité pour revenir aux valeurs artistiques traditionnelles. Ses peintures se bornent à des sujets d’histoire, à des scènes mythologiques ou à des nus académiques, qui réinterprêtent l’idéal classique.

[…] nous proclamerons par contre la nécessité d’un retour prompt et réfléchi à la Tradition « éternelle » et partant toujours « jeune ». Emile Bernard 1905

Vous l’aurez sans doute compris, c’est le début de l’exposition qui mérite le détour : les premières œuvres d’Emile Bernard qui ont contribué à l’essor de l’art moderne. Des toiles fortes, qui paraissent finalement beaucoup plus récentes (et intéressantes !) que les dernières qu’il a peintes ! J’aurais aimé vous en montrer plus encore et je ne peux que vous encourager à aller les voir en vrai ! D’ailleurs, arrivée à la fin de l’expo, moi j’ai fait demi-tour pour les contempler à nouveau !

Et si vous passez au Musée de l’Orangerie, n’oubliez pas d’aller saluer les Nymphéas de Claude Monet et d’aller faire un tour dans le Jardin des Tuileries, magique à cette époque de l’année !

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